Protection de l’habitat essentiel du chevalier cuivré
Avec plus de 100 mois de retard, et environ 4 mois après le dépôt d’une demande de contrôle judiciaire, la ministre fédérale des Pêches et des Océans et le ministre de l’Environnement ont enfin signé l’arrêté ministériel activant l’interdiction de détruire l’habitat essentiel du chevalier cuivré en vertu de la Loi sur les espèces en péril.
La genèse du recours
Le 7 janvier 2021, la Société pour la nature et les parcs du Canada (SNAP) et le Centre québécois du droit de l’environnement (CQDE) ont déposé une demande de contrôle judiciaire à la Cour fédérale contre la ministre fédérale des Pêches et des Océans.
Les demandeurs se portaient à la défense du chevalier cuivré (Moxostoma hubbsi), une espèce de poisson menacée de disparition. Il s’agit du seul poisson ayant une aire de répartition exclusive au Québec. Celle-ci est très restreinte, se limitant à un tronçon d’eau douce du fleuve Saint-Laurent situé entre le lac Saint-Louis et le lac Saint-Pierre et à quelques-uns de ses affluents, dont la rivière Richelieu. La protection de l’habitat essentiel du chevalier cuivré est primordiale pour assurer sa survie et son rétablissement.
Par ce recours, la SNAP et le CQDE exigeaient la mise en œuvre du paragraphe 58(5) de la Loi sur les espèces en péril. Ce paragraphe prévoit que la ministre des Pêches et des Océans doit mettre en œuvre un mécanisme relatif à la protection de l’habitat essentiel d’une espèce en péril désignée dans les 180 jours suivant la mise dans le registre du programme de rétablissement de l’espèce.
Le gouvernement fédéral contrevenait à sa propre Loi sur les espèces en péril à l’égard de l’habitat essentiel du chevalier cuivré, une espèce de poisson qu’on ne retrouve qu’à un seul endroit au monde, au Québec. En effet, la Ministre accusait un retard de plus de huit ans quant à son obligation d’activer les mesures d’interdiction de détruire l’habitat essentiel du chevalier cuivré.
Le 20 juin 2012, le Ministre titulaire de l’époque mettait dans le registre public des espèces en péril le programme de rétablissement du chevalier cuivré. En vertu de la législation, le ministre fédéral responsable des Pêches et des Océans aurait dû prendre un arrêté ministériel pour protéger l’habitat essentiel de cette espèce au plus tard 180 jours après cette date, soit le 17 décembre 2012. Cet arrêté ministériel vise à interdire complètement de détruire des « éléments » de cet habitat, lequel a été établi par les scientifiques fédéraux.
Par le dépôt de cette demande, la SNAP et le CQDE cherchaient à obtenir une ordonnance visant à enjoindre à la ministre des Pêches et des Océans de mettre en œuvre un mécanisme relatif à la protection de l’habitat essentiel du chevalier cuivré, tel que prescrit par la Loi sur les espèces en péril. De plus, ils demandaient l’émission d’un jugement déclaratoire reconnaissant que la ministre a agi illégalement en omettant de le faire dans les délais prescrits.
Une victoire décisive
L’adoption de l’arrêté ministériel par le gouvernement fédéral est une grande victoire pour le chevalier cuivré, surtout dans le contexte où le projet d’expansion du port de Montréal à Contrecoeur menaçait l’intégrité de l’habitat essentiel de l’espèce. TJL est fier d’y avoir contribué!
La SNAP, le CQDE et les avocats de TJL restent cependant vigilants quant à toute demande d’autorisation qui pourrait entraîner la destruction d’éléments de l’habitat essentiel du chevalier cuivré. Les conditions d’émission d’une telle autorisation, prévues à l’article 73 de la Loi sur les espèces en péril, sont strictes et indiquent clairement qu’une activité autorisée ne peut mettre en péril la survie ou le rétablissement de l’espèce.